Une vie après le Fléau

Par une belle journée d'Hiver la jeune Nelle était partie avec son père dans les clairières de Tirisfal chasser pour le repas. Mais au fur et à mesure de leurs pas, l'air semblait s'appesantir. Il régnait une odeur indéfinissable, les animaux se cachaient et la nature entière semblait en suspens, inquiète d'un évènement terrible. Le père s'arrêta brusquement à l'entrée du village de Brill, les yeux horrifiés.

-Par tous les diables! Mais que s'est il passé? Où sont les gardes? Où sont les camelots, les troubadours? Pourquoi les forges sont elles arrêtées?

En y regardant bien, il se rendit compte que le bois des bâtiments semblait s'effriter, et finit par paniquer totalement. Entrainant une Nelle terrifiée il courut au village du Glas, vers sa demeure et son épouse restée seule. Arrivés à leur chaumière, ne constatant rien il se résolut à aller trouver le capitaine de la Garde quand il se sentit défaillir. Sa peau se craquelait, et en regardant sa fille il s'apercut qu'elle était sur le sol, agitée de convulsions, le corps recouvert de plaies purulentes. Se trainant parterre, il apercut le cadavre de sa femme gisant à l'entrée de leur chambre, et entendit alors les râles des mourrants dans tout le village. La Peste faisait son oeuvre destructrice.

La suite plus tard

Lorsqu'une escouade venue de Lordaeron en patrouille pénétra dans le village, peu furent les soldats à ne pas s'évanouir d'horreur devant le spectacle de ces cadavres grimaçants de douleur. Un capitaine plus courageux se décida à rentrer dans ce qui restait d'une chaumière et ramassant dans ses gants en plaque le corps sans vie d'une fillette, il versa une unique larme sur la joue de l'enfant, puis décida de l'enterrer. Sans se douter qu'en offrant une sépulture à cette être, il lui donnait aussi sa raison d'être future, et un moyen de se venger.

(la suite encore plus tard)

Un grincement métallique, des gargouillements, de temps en temps un souffle glacial transpercant un air lourd et humide, et surtout ces grondements, ces râles...Elle ouvrit d'abord un oeil, puis l'autre, et enfin tous ses sens se mirent en éveil. Se sentant comprimée, elle essaya de bouger son corps sans paniquer, comme Papa lui avait appris lors de leurs promenades dans la forêt. Sentant un contact rugueux,dur et dénué de vie sous sa main, elle tenta de se redresser, y parvint et ressentit plus profondément tous ces mouvements de l'air et tous ces bruits qui l'entouraient. Regardant autour d'elle, elle fut horrifiée de voir qu'elle était dans ce qu'elle crut d'abord etre une immense crypte, entourée de créatures difformes, de géants dont les tripes exhalant une odeur de mort pendaient de leur ventre, et surtout d'êtres ressemblant aux siens contenus dans des cages à peine plus grandes qu'eux. Terrorisée, elle se leva complètement, se rendant tout à coup compte qu'elle était prisonnière de ce que Maman appelait "cercueil" quand ils allaient se recueillir sur la tombe de Grand père les dimanches. Elle sauta à bas, tentant de se réfugier vers les siens, fuyant cet égout rempli de liquide vert qu'elle apercevait derrière elle. C'est alors qu'une main dont seuls les os subsistaient l'aggripa et qu'elle entendit pour la première fois la voix qui était devenue la sienne pour l'éternité.

- Lachez moi! Je vous en prie, laissez moi partir *les mots s'étranglent dans sa bouche, sa voix s'éteint petit à petit* Je veux mon père....

- Ma petite, ton père, ta famille sont morts, jamais tu ne les reverras. Ta demeure est ici, je suis le Garde Noire Harrigan. Je t'ai veillée depuis plusieurs semaines, pendant que nos Apothicaires noirs expérimentaient leurs potions sur ton corps et ton Ame. Et maintenant que te voilà prête - dit-il en ricanant - nous allons te trouver l'accoutrement qui convient à tes futures fonctions.

(la suite encore plus tard, grosse fatigue)

Prenant Nelle par le bras, le Garde Noir la traîna malgré elle le long de ces couloirs immenses et fétides. Malgré ces apparences, Nelle se rendit compte petit à petit qu'une forme de vie qu'elle ne connaissait pas habitait ces lieux, des bruits d'étals, des cris de marchands, des étrangers aux longues oreilles ou aux cornes acérées qui se pressaient les uns contre les autres devant ces être difformes. Petit à petit remontaient en elle les souvenirs des marchés qu'elle parcourait avec son père, et malgré elle Nelle se sentait plus familière de ces lieux au fur et à mesure qu'elle les découvrait. Arrivés devant un long couloir dans lequel s'alignait un bataillon de Gardes Noirs, Harrigan s'arrêta et tourna Nelle vers lui.

Mon enfant, tu vas te trouver devant la Dame Noire, notre maîtresse, le guide de notre peuple, de ton peuple maintenant. Sache qu'elle est omnipotente, qu'elle aussi a vécu, aimé, qu'elle est morte tuée par la traîtrise d'un de nos semblables. Par là je veux surtout te signifier qu'elle peut être dure, cruelle, mais toujours juste. Si tu la sers comme je l'ai servie, elle saura te montrer qu'à travers la mort résidera toujours une infime parcelle de vie, et elle te donnera les moyens de te souvenir sans en souffrir. Tu sais, j'ai vécu ici il y a bien longtemps, j'ai aimé ma femme et ma fille autant que je le pouvais. Jusqu'à la destruction de ce monde par la folie d'un homme, j'ai été comme ton père. * Sa voix se fait plus douce, ses yeux s'égarent au loin, perdu dans un lointain souvenir. Puis subitement, toute vie semble se retirer à nouveau de lui, et il reprend Nelle par le bras.* Allons y! On ne fait pas attendre la Dame Noire!

Arrivés au bout du couloir, Nelle découvrit une immense salle ronde, haute de plafond, autour de laquelle étaient postés d'autres gardes, ainsi que des hommes en armure de bataille. Au milieu d'une esplanade entourée de marches, se tenaient un être translucide qui semblait en retrait, une immense bête cornue, dont le regard vous transpercait les os, nanti d'ailes crochues dont la seule vision suffit à épouvanter Nelle, et surtout ce que Nelle prit d'abord pour une elfe. Le personnage terrifiant l'observa un moment, grogna puis détourna le regard avec indifférence. S'approchant de l'elfe, Nellle et Harrigan gravirent les marches lentement, et ce dernier s'inclina avec déférence, forcant sa protégée à en faire de même. La jeune réprouvée sentit alors émaner de la Dame Noire une sentation de froid et de mort,mêlé à un sentiment de droiture de l'Ame qui suffit à lui faire comprendre ce qu'avait voulu lui dire Harrigan. Semblant sortir de sa torpeur rêveuse, Sylvanas Windrunner l'observa longuement puis s'adressa à elle.

Jeune guerrière, Harrigan qui est ici fait partie de ma garde personnelle. Par celà même ma confiance en lui est grande. Il m'a parlé de toi, m'assurant que tu étais un être dont les réprouvés pouvaient tirer avantage. J'ai donc accepté qu'il commence ta formation au sein de notre corps d'armée. Tu seras, de maille et de plaques d'acier vêtue, placée au premier rang des combats. Tu n'éprouveras plus la peur, ni la souffrance. Tu me seras dévouée jusqu'à la fin des temps, jusqu'à ta dernière goutte de sang. Si tu accomplis ton devoir, je saurais te récompenser! *Ricanant* Pas comme ces idiots de Garithos de Detheroc ou de Balnazzar. Pour commencer les épreuves de ta formation, j'ai suggéré à Harrigan de t'envoyer nettoyer un certain village que tu connais bien de sa vermine pestiférée. Il t'expliquera tout ca plus clairement, j'ai un entretien avec les émissaires de Thrall qui se profile, mon temps m'est compté. As tu bien saisi ce que je t'ai dit jeune réprouvée? Je ne tolèrerais aucune incartade ni aucun faux pas de ta part.

Oui, Dame Noire *répondit d'une petite voix Nelle, terrifiée, la peur au ventre, écrasée par la puissance de Sylvanas.*

Alors, vas! Harrigan, emmenez la!

En ressortant de la salle royale, Harrigan conduisit Nelle dans un recoin du quartier marchand. L'odeur de métal fondu, la chaleur, les bruits des marteaux de forge y étaient insupportables. Un homme s'approcha d'elle, et Harrigan lui chuchota quelques mots à l'oreille. Sans mot dire, il prit sur son étal quelques pièces d'armure, qu'il fit passer à Nelle sans aucun ménagement. Harrigan la conduisit à nouveau à travers le dédale de la ville, et, remontant à l'air libre, lui fit traverser d'immenses portes de pierre protégées par une chicane. Devant, sur un longue esplanade pavée, attendaient plusieurs autres jeunes réprouvés.

Tu vas partir avec ce détachement Nelle. Il est chargé d'éliminer le fléau pestiféré au Glas et à Brill, les villes voisines. Tu les suivras, tu vivras avec eux, tu tueras en leur compagnie, sans relâche, sans peur. Le chef de détachement est le sergent Eowyna, ton régiment se nomme Necromundi. Vas mon enfant, tue! Pour les réprouvés, pour toi, et accessoirement, *dit il en ricanant* pour la Horde.

Se retournant brusquement, il rentra d'un pas rapide dans les profondeurs de la cité souterraine. C'était fini, sans mot dire, Nelle se rangea au côté de ses frères d'arme, prête à faire ce pour quoi on l'avait maintenue dans cette non vie: Tuer.